Appréhender le monnayage de Gordien III : méthodes de numismatique historique

Par Thomas Bardin
Publication en ligne le 02 avril 2014

Résumé

Numismatics is a unique field of study for political, economic and military history of the Roman Empire, especially in the iiird century, from which the literary sources are particularly fragmented. The Roman coinage of this period is abundant; and has already been the subject of classifications in the main reference corpus. It is now possible to complete it with a targeted research. The reign of Gordian iii (238-244 A.D.) occupies a special place in monetary history and illustrates the methodology and selection criteria in the establishment of a representative numismatic corpus of a given period, as well as expected results.

La numismatique constitue un champ d’étude privilégié pour l’histoire politique, économique et militaire de l’Empire romain, et plus particulièrement celle du iiie siècle où les sources littéraires conservées demeurent fragmentaires. Or, le monnayage romain de cette période est abondant et a déjà fait l’objet de typologies et d’études au sein de corpus de référence qu’il est aujourd’hui possible de compléter par une collecte ciblée. Le règne de Gordien iii (238-244 ap. J.-C.) occupe une place singulière dans l’histoire monétaire et permet d’illustrer la méthode de recherche et les critères de sélection retenus pour établir un corpus numismatique représentatif sur une période donnée, ainsi que les résultats attendus.

Mots-Clés

Texte intégral

Introduction

1Le récit historique d’Hérodien s’interrompt avec la description des événements de 238 ap. J.-C. et l’avènement de Gordien iii, ce qui pose un sérieux problème de sources pour l’étude du iiie siècle1. L’historien ne dispose plus d’annales et doit composer avec les biographies de l’Histoire Auguste. Afin de compenser les lacunes et les incertitudes de cette histoire impériale, il faut se tourner vers d’autres types de documents : l’objet numismatique est précisément abondant pour cette époque. Afin de mener une étude historique, le choix des sources primaires s’est porté sur le monnayage impérial, c'est-à-dire sur l’ensemble des dénominations* monétaires émises par l’autorité impériale. Ce corpus des frappes impériales ne prend pas en considération les monnaies dites provinciales qui circulent à la même époque dans l’Empire2. L’objectif est de recenser, de restituer en volume, puis de classer l’ensemble des types* monétaires produits par le pouvoir central : le catalogue raisonné des frappes monétaires constitue une archive officielle qu’il est possible d’exploiter, à condition de tenir compte de la réalité des modalités de frappe des monnaies3. L’abondance, la dispersion et les particularismes du monnayage impérial déterminent les choix retenus dans l’établissement du corpus numismatique, dont la vocation est de fournir, au-delà d’un catalogue descriptif, un outil prolifique pour l’enquête historique4.

2En réalisant le corpus des frappes impériales, nous souhaitons d’abord restituer la réalité à un moment particulier d’un système monétaire défini depuis Auguste, mais qui connaît une véritable mutation dès le début du iiie siècle.

Le cadre : spécificités du monnayage impérial

Approche globale du système monétaire

3Dans l’Empire, bien que certaines cités et colonies conservent le privilège de frapper leur propre monnaie, la majorité du numéraire en circulation provient des ateliers impériaux, et principalement de l’atelier de Rome. Un atelier impérial s’installe ponctuellement à Antioche de Syrie, afin d’émettre à proximité du front oriental lorsque les besoins en monnaie sont importants. Le corpus s’appuie donc sur les productions parallèles de Rome et d’Antioche sous autorité impériale. Les légendes monétaires et les dénominations spécifiques au système monétaire romain distinguent ces productions des monnayages provinciaux. Ce système monétaire impérial repose sur la frappe de plusieurs dénominations de valeurs différentes dans trois métaux : or (AV), argent (AR) et bronze (AE).

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Fig. 1 : Les dénominations frappées à Rome pour Gordien III. © Th. Bardin 2014 (voir l’image au format original)

4Le premier objectif du corpus est de recenser la grande diversité de ces frappes qui ne sont ni systématiquement émises de manière continue ni dans les mêmes quantités. Le recensement des types frappés pour ces dénominations permet de fixer une typologie et de mettre en relief les rapports – liens ou déconnections - entre chacune d’elles. Si leur rapport de valeur théorique est fixe et n’appelle aucun commentaire, le choix d’émettre telle dénomination avec tel type et à tel moment est historiquement significatif. La principale innovation dans ce système est la réintroduction massive et continue sous Gordien iii d’une monnaie créée sous Caracalla : l’antoninien remplace alors avec une double valeur faciale (effigie à couronne radiée) le denier, qui n’est désormais plus que ponctuellement émis5. L’étude du monnayage impérial vise donc également à une meilleure compréhension de l’histoire économique et monétaire de l’Empire6. Ce choix d’une approche globale justifie l’intégration systématique au corpus monétaire de tous les médaillons impériaux : ceux-ci sont également produits par les officiers monétaires, et bien qu’il ne soit pas assuré qu’ils aient une valeur monétaire réelle, nous avons démontré leur parallélisme avec les monnaies courantes7. L’exploitation historique d’un corpus de monnaies impériales doit toutefois rester prudente, puisque l’organisation pratique des frappes, et en particulier le rôle de l’empereur dans le choix de celles-ci, reste encore mal connue bien que son implication ou celle de son entourage dirigeant apparaisse souvent déterminante.

5Une telle entreprise de révision à la fois typologique et volumétrique des émissions impériales s’appuie sur les corpus numismatiques de référence existants : du fait de leur vaste couverture chronologique et de leur ancienneté, ils constituent des outils pratiques, mais nécessairement datés et perfectibles.

Révision des ouvrages de référence

6Les typologies des monnaies impériales sont fixées par plusieurs corpus qu’il est désormais possible de réviser, notamment grâce à un corpus de source élargi. En effet, si la volonté de rassembler la diversité des frappes impériales au sein de catalogues descriptifs est ancienne, l’accès à un plus vaste matériel documentaire permet de compléter ou de rediscuter fondamentalement des typo-chronologies jusqu’à présent considérées comme établies. Car c’est bien un défaut de source qui pénalise l’usage de ces ouvrages : la monumentale encyclopédie initiée par Henry Cohen au xixe siècle ne rendait d’abord pas compte du système des dénominations monétaires, mais surtout elle reposait presque exclusivement sur les monnaies alors conservées au Cabinet des médailles de Paris8. A ces limites s’ajoute le choix de l’auteur de classer les monnaies par ordre alphabétique des légendes de revers. Francesco Gnecchi retiendra le même classement de commodité pour les médaillons impériaux9, tout en réalisant un inventaire détaillé des exemplaires/spécimens* localisés pour chacun des types décrits : ce recensement des spécimens est rendu possible et indispensable en raison de l’extrême rareté et de la dispersion du matériel cité. La véritable révolution méthodologique en matière de corpus numismatique apparaît avec le classement chronologique des types monétaires, souhaité mais abandonné par H. Cohen, et initié par les savants britanniques en charge des volumes du Roman Imperial Coinage (RIC). Ces publications, de qualité inégale, font aujourd’hui autorité en numismatique impériale, et intègrent une étude historique justifiant les classements proposés pour dépasser le simple catalogue descriptif. Le corpus des sources consultées est variable d’un volume à l’autre de la collection, et le règne de Gordien III bénéficie ainsi d’un classement à deux vitesses10 : d’abord une évidente succession des émissions monétaires* pour les antoniniens, puis un classement – par défaut – autour de cette structure pour les autres dénominations11. Les types décrits sont accompagnés, lorsqu’ils sont rares, d’une citation de spécimen, mais une grande partie de ces citations renvoient simplement à l’ouvrage de Cohen. Pour cette raison, un certain nombre de types doit être considéré comme douteux en l’absence de spécimen identifiable ou consultable.

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Fig. 2 : Les types monétaires de Gordien iii non authentifiés. © Th. Bardin 2014 (voir l’image au format original)

7Ces incertitudes ajoutées aux types non ou mal décrits sont des lacunes qu’il est maintenant possible et indispensable de combler afin de reconsidérer les classements admis. Malgré ces limites ces ouvrages anciens demeurent des repères incontournables dont la typologie sert toujours de référence. Plusieurs publications viennent ponctuellement préciser ou compléter la structure des émissions proposée dans le RIC, par une étude circonscrite à une fraction du monnayage12. Le réexamen et la citation du matériel décrit sont aussi à l’origine des corpus de synthèse consacrés à une dénomination13. Enfin, les publications plus récentes des catalogues de collections offrent des corpus de sources parfaitement identifiables mais dont la nature même ne saurait faire de ces ouvrages des synthèses : la publication des monnaies romaines du British Museum, qui fait référence, s’interrompt précisément avant l’avènement de Gordien iii14. Pour ce règne, on peut toutefois se reporter à des collections de moindre importance numérique, en particulier à celle de Glasgow qui conserve plusieurs types inédits15.

8Ce rapide bilan historiographique montre que l’établissement d’un corpus recensant et organisant de manière globale toutes les frappes impériales nécessite, outre une vérification et une mise à jour du matériel déjà cité, une méthode de collecte adaptée aux disparités. Les corpus de référence offrent l’avantage de mettre en évidence le degré de rareté et de documentation des types monétaires, orientant les nouvelles recherches sur les lacunes. L’objectif d’un nouveau corpus est d’établir un échantillonnage représentatif pour l’étude sur chacune des dénominations impériales et dans chacun des types.

Un référencement à géométrie variable

9Il n’est ni possible ni utile de recenser individuellement tous les exemplaires/spécimens d’un type monétaire courant : les antoniniens, mais aussi les deniers et les sesterces de Gordien iii sont bien connus et documentés puisqu’ils ont été retrouvés en grand nombre16. Parmi ces dénominations courantes, la collecte est axée sur les types les moins répandus, afin de restituer la typologie précise et d’apprécier la signification historique de ces séries limitées : cela concerne quelques antoniniens de l’atelier syrien, mais aussi et surtout plusieurs séries de bronze frappées à Rome, les rares monnaies à l’effigie de l’impératrice Tranquilline, et les tous premiers deniers du règne. La même attention doit être portée de manière systématique à l’inventaire des spécimens frappés dans les dénominations rares ou exceptionnelles, à commencer par les monnaies d’or dont nous avons recensé 422 spécimens17.

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Fig. 3a : Typologie des multiples (médaillons) en or de Gordien III. © Th. Bardin 2014 (voir l’image au format original)

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Fig. 3b : Typologie des deniers en or (aurei) de Gordien III. © Th. Bardin 2014 (voir l’image au format original)

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Fig. 3c : Typologie des sous-multiples (quinaires) en or de Gordien III. © Th. Bardin 2014 (voir l’image au format original)

10Le corpus rassemble ainsi tous les aurei, double aurei, quinaires d’or ou d’argent, dupondi et médaillons, dont les types les plus rares ne sont parfois représentés que par un unique exemplaire conservé. L’objectif est d’abord de restituer leur variété typologique, puis de proposer une quantification relative de la frappe de ces dénominations rares par rapport aux dénominations courantes. En compilant les données existant sur ces dernières avec celles collectées sur les premières à partir d’un corpus significatif, il devient possible de reconstituer la réalité d’un système global.

11Pour atteindre ce but, nous avons choisi de revenir aux sources matérielles, par une collecte des monnaies qui investit les trois terrains spécifiques sur lesquels l’enquête numismatique peut être menée avec profit.

L’objet : une collecte documentaire élargie

Les collections institutionnelles

12En volume, le cœur du corpus de la présente étude est constitué par des monnaies conservées dans les institutions publiques, jusque-là non publiées ou imparfaitement décrites, et régulièrement alimentées par des acquisitions. Les médailliers les plus riches, aujourd’hui pour la plupart conservés dans les départements des monnaies anciennes des musées ou bibliothèques nationales, proviennent des anciennes collections royales et princières. Ces collections sont des lots de monnaies réunis artificiellement et ne sont donc représentatives d’aucune réalité historique en tant qu’ensemble, au sens archéologique du terme18. Pourtant, leur consultation systématique est à l’origine des premiers corpus de référence, et permet toujours, par leur mise en série, de compléter les typologies, puisqu’elles regorgent de pièces inédites. Le travail de collecte s’applique en premier lieu à réaliser l’inventaire puis la numérisation systématique et normalisée de ces fonds dormants : le catalogue s’appuie sur une campagne photographique massive accompagnée des informations indispensables à l’identification des monnaies recensées : relevé du poids, de l’orientation de l’axe des coins*, de la provenance lorsqu’elle est connue, et de l’identifiant individuel de l’objet dans l’inventaire ou le registre local. Les contraintes temporelles et financières de toute mission de recherche font qu’il n’est pas possible de réaliser cette collecte documentaire de terrain dans tous les lieux de conservation : la priorité est donnée, dans notre projet doctoral, aux collections majeures. Il s’agit à ce jour, par ordre chronologique des missions, de : Paris (Bibliothèque nationale de France), Lyon (Musée municipal des Beaux-arts), Oxford (Ashmolean Museum), Londres (British Museum), Cambridge (Fitzwilliam Museum), Glasgow (Hunterian Museum) et Vienne en Autriche (Kunstistorisches Museum)19. En fonction des contraintes spécifiques rencontrées, la numérisation systématique des fonds laisse parfois place à une numérisation sélective centrée sur les types les moins courants, comme à Londres (exclusion des antoniniens courants) et à Glasgow (numérisation des seuls inédits et médaillons puisque le fond est déjà publié).

13Parallèlement aux monnaies conservées dans les établissements publics, la quête d’exhaustivité implique la prise en considération du matériel « privé » apparu sur le marché de l’art à l’occasion de ventes publiques.

Les ventes publiques

14Des quantités considérables de monnaies issues de collections privées échappent à l’examen des chercheurs. Il est toutefois possible de capter une partie de ce matériel lorsqu’il apparaît sur le marché, puisque les monnaies font alors l’objet d’une notice descriptive dans les catalogues des ventes20, ou plus récemment sur internet21. Ce sont des occasions parfois uniques de relever une monnaie susceptible de disparaître de manière définitive ou cyclique. La réalisation du corpus s’appuie donc sur un dépouillement systématique des ventes des principales firmes spécialisées en numismatique. Cette recherche repose sur les catalogues anciens, dont l’accès est parfois difficile, puis sur une veille permanente en ligne : le critère d’illustration et l’indication du poids des exemplaires relevés est une condition indispensable à leur intégration au corpus, étant donnée l’impossibilité d’examiner physiquement les pièces. Cette recherche permet ainsi de réaliser l’inventaire de la majorité des plus de 400 aurei conservés de Gordien iii, dont plus de la moitié provient de ces ventes.

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Fig. 4a : Ventilation des aurei de Gordien III recensés. © Th. Bardin 2013 (voir l’image au format original)

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Fig. 4b : Catalogue des aurei FIDES MILITVM (RIC.7) de Gordien III. © Th. Bardin 2014 (voir l’image au format original)

15Chaque recensement veille à la détection des doublons et à l’établissement du pédigrée de chaque pièce, dans la mesure où un même spécimen peut être mis en vente plusieurs fois22. Un certain nombre de médaillons inconnus de Francesco Gnecchi sont apparus en ventes ; et plusieurs d’entre eux correspondent à des types inédits. Il s’agit de pièces majeures provenant de collections privées prestigieuses : les collections de Sir Arthur John Evans23, du Prince de Waldeck24, de Franz Trau25, de Carlo Piancastelli26, de Giusepe Mazzini27, de Gilbert Steinberg28 et de Leo Benz29.

16Si les collections et les ventes numismatiques permettent de compléter la typologie du corpus sur les monnayages rares, les fouilles archéologiques publiées génèrent des données complémentaires sur les monnayages plus courants.

Les publications archéologiques

17Le iiie siècle étant une période de forte thésaurisation, les trésors contenant des monnaies de Gordien iii, essentiellement constitués d’antoniniens, sont nombreux. Il s’agit cette fois d’ensembles possédant une logique d’accumulation de valeur historique et offrant de grandes quantités de monnaies dont l’étude statistique est bénéfique. En partant des trésors les plus significatifs, contenant plusieurs centaines ou milliers de monnaies d’un même règne, il est possible de déterminer le volume relatif de chaque type monétaire par le nombre d’exemplaires correspondants accumulés. Le corpus compile de cette manière les données publiées de 21 trésors monétaires, formant un échantillon totalisant près de 25 000 antoniniens. Par ordre d’importance décroissante, nous intégrons les volumes d’antoniniens fournis par les trésors de Dorchester30, Bath31, Eauze32, Smédérévo33, Saint-Jean-d’Ardières34, Rue35, Burwash36, Schwarzenacker37, Baalon38, Smyrne39, Iasos40, Nanterre41, Plevna42, Reka-Devnia43, Beachy Head44, Allones45, Uskub46, Sterrebeek47, Banasa48, Gösseling49 et Erétrie50.

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Fig. 5 : Volume des émissions d’antoniniens de Gordien III à Rome. © Th. Bardin 2013 (voir l’image au format original)

18Il est admis que des types d’antoniniens représentés en volumes similaires dans les dépôts monétaires appartiennent à une même émission, suggérant un fonctionnement de l’atelier de Rome en six officines, frappant chacune un type d’antoninien différent simultanément. Le volume de chacune des émissions renseigne à la fois sur la quantité de monnaies émises et sur la durée d’émission de celles-ci. De telles quantités thésaurisées sont inexistantes pour les sesterces, même courants : une approche similaire et comparative est toutefois menée à partir des données du trésor de sesterces de Guelma51. La publication de découvertes isolées d’aurei permet parfois de compléter le corpus des dénominations rares.

19L’exposé méthodologique qui précède met en évidence la complémentarité des terrains de collecte dans l’établissement d’un corpus numismatique du monnayage impérial dans son ensemble, en fournissant chacun avec leurs spécificités leur lot d’informations typologiques ou statistiques. La mise en série des spécimens, puis l’organisation chronologique du schéma des émissions successives qui en résulte, offrent un cadre précieux pour réaliser une étude historique pertinente.

L’étude : l’intérêt historique du corpus numismatique

L’organisation chronologique des émissions

20Le classement chronologique des monnaies est désormais une norme pour tous les corpus numismatiques. Mais, seule une partie des monnaies frappées est datée par une titulature impériale mentionnant les consulats (2) et les puissances tribuniciennes (7) revêtues par l’empereur, à condition que leur comput soit connu52. D’autres événements impériaux surgissent ponctuellement dans l’iconographie ou les légendes monétaires, et fournissent autant de marqueurs chronologiques, à condition d’être correctement lus : les quatre liberalitates correspondent exactement aux quatre congiaires distribués à la plèbe frumentaire de Rome, impliquant la présence physique de l’empereur dans la Ville. La démarche consistant à préciser la chronologie des événements accorde une grande place aux déplacements de la cour impériale : départs en campagne, succès militaires et retours à Rome. Plusieurs séries de monnaies et de médaillons, datées de la troisième puissance tribunicienne de Gordien III, célèbrent ainsi, sans jamais le nommer, le retour à Rome (adventus Augusti) du jeune prince après un voyage supposé en Orient53. C’est l’identification de scènes de revers spécifiques sur les séries de bronze, et dont le message s’adresse uniquement aux Romains et aux Italiens, qui permet de fixer la réalité de l’événement54.

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Fig. 6 : Iconographie de l’adventus sur les bronzes de Gordien III. © Th. Bardin 2013 (voir l’image au format original)

21Grâce à ces repères et aux données du corpus, il est possible d’entreprendre une reconstitution globale de la chronologie des émissions successives. La notion d’émission elle-même est subjective et repose sur un faisceau de présomptions des numismates. Nous avons déjà dit comment les volumes d’antoniniens thésaurisés dans les dépôts monétaires mettent en relief une succession de séquences monétaires de six types. L’objectif du corpus est d’approcher cette finesse de classement pour les autres dénominations, sur la base de déductions typologiques et historiques. L’échantillonnage ciblé et correctement illustré rassemble un nombre de spécimens suffisamment conséquent pour entreprendre des sondages dans la recherche de liaisons de coins entre les monnaies de séries datées et les autres, en particulier pour les dénominations de bronze : en reconnaissant un coin monétaire commun ayant servi à frapper deux monnaies, nous pouvons rapprocher chronologiquement les frappes des deux spécimens55.

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Fig. 7a : liaison par le coin de droit entre deux sesterces (240 ap. J.-C.). © Th. Bardin 2013 (voir l’image au format original)

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Fig. 7b : extrait du réseau des liaisons de coins entre les aurei de la 1ère émission. © Th. Bardin 2013 (voir l’image au format original)

22Il est toutefois vain de prétendre saisir la complexité de toute la chaine de production des monnaies dans chacune des dénominations et de chercher à produire systématiquement des schémas d’émissions cohérents, qui n’ont peut être jamais existé. Face aux disparités constatées dans le nombre d’exemplaires conservés par type sur les autres dénominations, il semblerait judicieux d’opérer un classement isolant les séquences d’émission propres à chaque dénomination avant de proposer une restitution d’ensemble56.

23L’histoire événementielle de Rome, et celle du iiie siècle en particulier, impacte directement la politique monétaire et la situation économique du gouvernement central, sans cesse confronté au problème croissant du financement des opérations militaires. Pour apprécier ces phénomènes, une approche métrologique du corpus numismatique apparaît complémentaire.

L’approche métrologique du phénomène monétaire

24L’usage statistique des données typologiques évoquées précédemment peut être étendu à la métrologie par une mise en série des poids des monnaies, afin de déterminer l’évolution du poids moyens des antoniniens et de repérer les éventuelles manipulations monétaires opérées durant leur production. Mais en complément, notre projet intègre une série d’analyses sur la composition métallique du monnayage. Ce type de recherche se limitait auparavant à déterminer la composition de surface, souvent trompeuse57 ; il est aujourd’hui possible d’obtenir par activation neutronique des précisions sur la composition interne des flans58. En raison de leur coût élevé, ces analyses sont menées sur un nombre réduit de pièces, et l’interprétation de leurs résultats doit tenir compte de ce fait. Par conséquent, le choix des spécimens sélectionnés pour cet examen, effectué au sein de la collection Bibliothèque nationale de France59, est déterminant.

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Fig. 8 : Spécimens de Gordien III soumis pour analyse à l’IRAMAT. (voir l’image au format original)

25Sur les monnayages courants, il est pertinent de concentrer les analyses sur des antoniniens datés par les puissances tribuniciennes successives pour appréhender l’évolution chronologique de la composition de leur alliage. Quant aux monnayages rares, l’enjeu est de vérifier l’authenticité de deux monnaies d’or d’une part, et de déterminer d’autre part dans quelle mesure les grands médaillons impériaux de bronze sont bimétalliques.

26Bien qu’il ne soit pas possible de couvrir plus d’exemplaires les analyses et l’approche métrologique du corpus numismatique permettent de dépasser ou d’alimenter les classements typo-chronologiques traditionnels. L’ensemble peut enfin être complété par une lecture iconographique et sémiologique du langage monétaire, vecteur particulier mais privilégié de l’idéologie impériale.

L’idéologie véhiculée par la monnaie

27Si la succession des émissions et des alliages reconstitue une trame événementielle précieuse, il est également utile d’interroger de manière plus large l’idéologie présente dans le programme monétaire en relevant les permanences et les innovations dans les choix de mise en scène de l’autorité impériale sous Gordien III par rapport aux règnes précédents. Un corpus complet mettant en perspective, dans leur juste proportion, toutes les dénominations du système général est un préalable indispensable à ce genre de commentaire, si l’on souhaite éviter l’écueil d’une interprétation abusive60. Le choix diversifié des bustes figurés, des scènes de revers, des divinités ou des légendes, n’est pas anodin : les variations dans les représentations successives reflètent toujours la manière dont l’autorité impériale – ou à défaut l’autorité monétaire – perçoit la fonction de l’empereur et le déroulement de ses actions61. C’est justement parce que le discours monétaire apparait souvent stéréotypé que les variations sont significatives. Mais, toutes les dénominations ne sont pas émises pour les mêmes destinataires. Gordien III est un empereur enfant, et singulièrement ni son épouse (sauf en une occasion unique) ni son beau-père, préfet du prétoire et véritable bras droit du prince, n’apparaissent dans le monnayage : la fonction impériale est exclusive, et cette conception est une parenthèse significative après les monnayages dynastiques des Sévères. Par ailleurs, si l’empereur s’associe volontiers au début de son règne à la figure de Mars ou de la Vertu guerrière, c’est Sol qui prend le relai à l’occasion de la campagne persique. Il est vrai que de manière générale le monnayage régulier est monotone et ne présente pas de singularité particulière, sauf en de brefs moments qu’il convient d’identifier. Le répertoire iconographique le plus significatif est constitué par les nombreux médaillons conservés, en comparaison des autres règnes, et dont l’iconographie spécifique s’adresse aux élites dirigeantes de l’administration impériale.

28La complexité de cette rhétorique monétaire et les nombreuses difficultés de classement impliquent la comparaison avec d’autres documents : la numismatique est une science historique, et un corpus monétaire - même exhaustif - ne peut se suffire à lui-même. Les monnayages provinciaux62, ou celui de la Perse sassanide63, offrent par exemple le même champ d’investigation que la monnaie impériale, avec leurs spécificités propres, mais ne sont que ponctuellement connectés à l’histoire de l’Empire, par exemple lors des visites impériales dans les cités émettrices. Les sources littéraires, les papyri64 et les inscriptions fournissent de la même manière d’autres éléments de datation qu’il est utile de mettre en lien avec le corpus numismatique.

Conclusion

29Établir le corpus exhaustif des frappes impériales est une tâche impossible en raison de l’abondance et de la dispersion du matériel. C’est pourquoi, nous avons mis en œuvre une stratégie d’échantillonnage où chaque type monétaire est replacé dans une perspective globale vis-à-vis des autres : les monnaies les moins bien documentées sont ainsi systématiquement recensées, tandis que les séries courantes sont exploitées à partir de données quantitatives. Restituer la complexité et la variété du système des frappes impose une vérification des sources bibliographiques et une collecte élargie à tous les contextes de conservation. Cette recherche repose aujourd’hui sur l’examen, le recensement individuel et la numérisation de plusieurs milliers de monnaies conservées dans les institutions consultées, sur l’archivage des monnaies exceptionnelles parues en vente et sur l’exploitation de données concernant plusieurs dizaines de milliers d’antoniniens publiés en contexte archéologique. Cela a permis la découverte de nombreuses nouveautés qui alimentent ou reconsidèrent les classements fixés dans les corpus précédents. Le seul atelier de Rome a ainsi produit près de 400 variétés de monnaies et de médaillons sur les six années du règne considéré. Les choix retenus dans le recensement des spécimens rares permettent d’apprécier le volume d’émission de chacune de ces monnaies dans la production générale. Sur cette base, il est possible d’envisager une étude novatrice, toujours en cours, du règne de Gordien iii. Le corpus numismatique, même calibré, n’offre toutefois qu’un aperçu de la réalité d’un système monétaire que l’on ne peut qu’appréhender, sans jamais l’atteindre65.

Lexique

30Coin : Chaque monnaie romaine résulte de la frappe et de l’impression en relief sur les deux faces d’un flan métallique de deux coins monétaires gravés en creux. Des monnaies provenant de coins identiques peuvent être considérées comme chronologiquement proches. Ce constat est moins évident pour les coins de médaillons, parfois utilisés de manière discontinue.

31Émission : Groupe de monnaies différentes considérées comme ayant été frappées au même moment et formant une séquence dans le programme de l’atelier monétaire. L’emploi plus général du terme décrit la simple action d’émettre des monnaies, sans volonté de décrire un groupe en particulier.

32Exemplaire/spécimen : Monnaie localisée et examinée ; le nombre de spécimens connus par type monétaire détermine sa rareté (et par extension le volume dans lequel le type a été émis).

33Dénomination : Catégorie d’espèce monétaire mise en circulation, possédant une valeur fixe par rapport aux autres dans le système monétaire : aureus, denier, sesterce…

34Type : Combinaison entre un droit et un revers ; le terme est parfois employé pour parler simplement des types de revers. Les numéros de types dans les ouvrages de référence décrivent autant de variétés typologiques.

Notes

1 Sur l’état des connaissances sur le règne de Gordien III, voir Xavier Loriot, « Les premières années de la grande crise du iiie siècle, de l'avènement de Maximin le Thrace (235) à la mort de Gordien III (244) », dans Aufstieg und Niedergang der römischen Welt, II.2, 1975, p. 659-787, ainsi que Katrinn Hermann, Gordian III. Kaiser einer Umbruchszeit, Kartoffeldruck-Verlag, Spire, 2013.

2 La plupart des monnayages autorisés sont émis dans la partie orientale de l’Empire, et l’on parle à ce propos de monnaies grecques impériales. Quelques monnaies à légendes latines existent malgré tout, en particulier celles frappées par les colonies, comme à Viminacium.

3 A défaut d’être conçues comme des archives, les monnaies impériales portent la marque des événements marquants et l’on sait que l’atelier monétaire de Rome conservait la propre mémoire de son activité : voir en particulier Michael Grant, Roman Anniversary Issues. An exploratory study of the numismatic and medallic commemoration of anniversary years 48 B.C.-A.D. 375, Cambridge University Press, Cambridge, 1950.

4 Le corpus de thèse, qui couvre dans son intégralité la période allant de la proclamation de Gordien Ier à Émilien, est en construction : les données quantitatives sont ici produites à titre illustratif et sont amenées à évoluer avec la collecte documentaire. Cet article se veut un manifeste de démarche scientifique adressé aux historiens non spécialistes en numismatique et en aucun cas une production de données scientifiques sur le sujet. De manière plus générale, voir aussi Jean Hiernard, « Une source de l’histoire romaine : la monnaie impériale de Septime Sévère à Constantin », dans Pallas, Hors-série, 1997, p. 79-125.

5 Sur l’évolution du système monétaire dans la première moitié du iiie siècle : Roger Bland, « Chapter 28. From Gordian III to the Gallic Empire (AD 238-274) » dans The Oxford Handbook of Greek and Roman Coinage, William Metcalf (éd.), Oxford, Oxford University Press, 2012, p. 514-537 ; Jean-Pierre Callu, La politique monétaire des empereurs romains de 238 à 311, Paris, De Boccard, 1969. La valeur d’échange de l’antoninien par rapport au denier reste discutée.

6 Les dépenses impériales, alimentées par les émissions monétaires, sont en grande partie absorbées par les besoins militaires, et donc étroitement liées à l’histoire événementielle.

7 Thomas Bardin, « Les émissions de médaillons impériaux et le monnayage festif de Gordien iii », dans Revue numismatique, 171, 2014, à paraître. La publication longtemps séparée des monnaies et des médaillons, doit selon nous faire place à un classement global des frappes impériales, sur la base des nombreuses connections typologiques entre celles-ci, et de la reconnaissance d’une seule autorité émettrice.

8 Henry Cohen, Description historique des monnaies frappées sous l'Empire romain, communément appelées médailles impériales, V : De Gordien d'Afrique à Valérien, 2e éd., Paris, Rollin & Feu Ardent, 1885. Le règne de Gordien III est traité dans le vol. IV dans la première édition de 1860 (Alexandre Sévère – Valérien le Jeune). La préface précise tout de même la consultation des anciennes collections de Londres et de Vienne.

9 Francesco Gnecchi, I medaglioni romani descritti ed illustrati, 3 vol., Milan, V. Hoepli, 1912.

10 Harold Mattingly, Edward Sydenham, Carol Sutherland, The Roman Imperial Coinage, IV.3: Gordian III-Uranius Antoninus, Spink And Son, Londres, 1949.

11 Les types communs aux antoniniens sont associés à leurs émissions respectives, mais les autres types, principalement en bronze, sont qualifiés de “surnumerary” par les auteurs. De très rares médaillons sont mentionnés ponctuellement.

12 En particulier l’émission d’avènement : Robert Carson, « The Coinage and Chronology of A.D. 238 », dans American Numismatic Society – Centennial, 1958, p. 181-199 ; Axel Jürging, « Die erste Emission Gordians III », dans Jahrbuch für Numismatik und Geldgeschichte, 45, 1995, p. 95-128.

13 Pour les aurei : Xavier Calico, Los aureos romanos 196 A.C.-335 D.C. Catalogo, Barcelona, X. & F. Calico, 2002 ; pour les quinaires : Cathy King, Roman Quinarii, From the Republic to Diocletian and the Tetrarchy, Oxford, Asmolean Museum, 2007 ; pour les antoniniens d’Antioche : Roger Bland, The coinage of Gordian III from the mints of Antioch and Caesarea [dactyl.], PhD thesis, Institute of Archeology, University College, Londres, 1991.

14 R. Carson, Coins of the Roman Empire in the British Museum, VI: Severus Alexander to Balbinus and Pupienus, Londres, Trustees of the British Museum, 1962.

15 Anne Robertson, Roman Imperial Coins in the Hunter Coin Cabinet, III: Pertinax to Aemilian, Londres/Glasgow/New York, Oxford University Press, 1977.

16 Voir infra, § 2.3.

17 L’existence de plusieurs d’entre eux reste encore tributaire d’une vérification par une illustration.

18 Bien que la majorité des monnaies conservées dans les médailliers provienne à l’origine de fouilles ou de découvertes fortuites, le contexte archéologique et la provenance sont aujourd’hui perdus.

19 L’obtention récente d’une bourse de l’École française de Rome devrait déboucher sur la consultation des collections de Rome (Muzeo Nazionale) et du Vatican (Biblioteca Apostolica), puis peut-être sur les autres médailliers italiens (Florence, Milan et Naples). D’autres collections d’envergure, au premier rang desquelles figurent celles de Berlin (Staatliche Museen), New-York (American Numismatic Society) ou encore Bruxelles (Royal Library) mériteraient d’être visitées à leur tour avant de pouvoir prétendre à l’exhaustivité théorique du corpus. Nous remercions chaleureusement R. Bland pour la communication de ses inventaires typologiques sur les monnaies d’or et de bronze réalisés lors de ses propres missions dans plusieurs de ces institutions.

20 François de Callatay, « Un problème de documentation en numismatique antique : les catalogues de ventes », dans Histoire et Mesures, 5.3-4, 1990, p. 259-269.

21 Ventes à venir sur http://www.sixbid.com ; moteurs de recherche spécialisés : http://www.coinarchives.com ; http://www.acsearch.info ; http://www.vcoins.com/en/coins/Ancient.aspx ; archives des maisons de ventes : : http://www.arsclassicacoins.com ; http://www.cgb.fr ; http://www.cngcoins.com ; http://www.lanzauctions.com ; http://www.nomosag.com

22 Une partie des 240 aurei apparus sur le marché doit encore faire l’objet d’une vérification par une illustration sur catalogue : cet inventaire est donc amené à évoluer. La réapparition récente en ligne d’aurei anciennement illustrés sur catalogue fournit avec bonheur des illustrations numériques de meilleure qualité permettant un examen approfondi des spécimens et ainsi la distinction des coins d’origine : cf infra, § 3.1.

23 Ars Classica S.A., vente XVII (Catalogue de monnaies antiques […] ainsi que la très importante collection de monnaies romaines formée par Sir Arthur J. Evans), Genève, 10.03.1935, lots 1649 à 1655.

24 Münzhandlung Basel, Vente publique 3 (Collection de monnaies et médaillons romains formée en majeure partie par le Prince W. vers la fin du xviiie siècle), Bâle, 04.05.1935, lots 823 à 836.

25 Gilhofer & Ranschburg, Adolph Hess A.G., Münzen der Römichen Kaiser (Sammlung Franz Trau), Vienne, 22.05.1935, lots 2669 à 2693.

26 Lorenza Cesano, Catalogo della collezione numismatica di Carllo Piancastelli, Soc. Tipografica Forlivese, Forli, 1957.

27 Giusepe Mazzini, Monete imperiali Romane. V.3: Da Pertinace a Filippo figlio, Mario Ratto, Milan, 1957-1958.

28 Numismatica Ars Classica & Spink, 16.11.1994, lot 676. Ce type, représenté par cet unique spécimen, découvert récemment par la consultation de ce catalogue est absent de Th. Bardin, « Les émissions de médaillons impériaux… » art. cit. n. 8.

29 Numismatik Lanz München, Auktion 100 (Sammlung Leo Benz), Munich, 20.11.2000, lots 238 à 250.

30 H. Mattingly, « The Great Dorchester Hoard », dans Numismatic Chronicle, 1939, p. 21-61. Les données sont faussées pour la première émission en raison de la non distinction à l’époque de la publication de types communs à Rome et à Antioche.

31 Trésor britannique, dit aussi de Beau Street, en cours d’étude au British Museum mais dont les premiers décomptes nous ont été aimablement communiqués par R. Bland : plus de 3 500 antoniniens de Gordien III, répartis dans six sacs ou dispersés.

32 Denis Schaad (dir.), Le trésor d’Eauze, bijoux et monnaies du iiie siècle après J.-C., Toulouse, 1992.

33 Données compilées dans H. Mattingly, « The Great Dorchester Hoard » art. cit. n. 28.

34 Vincent Drost, « Le trésor d’antoniniens de Saint-Jean-d’Ardières (Rhône), terminus 252 apr. J.-C. », dans Trésors Monétaires XXV, Bibliothèque nationale de France, 2013, p. 1-45.

35 Tahar Ben Redjeb, « Le dépôt monétaire de Rue », catalogue en ligne : http://ddata.over-blog.com/xxxyyy/4/15/63/09/Le-depot-monetaire-de-Rue/6-Gordien-III.pdf

36 Découverte faite à High Weald (East Sussex), en cours de publication, dont les classements m’ont été aimablement communiqués par R. Bland.

37 Données compilées dans H. Mattingly, « The Great Dorchester Hoard »…

38 Ibid.

39 Samuel Eddy, The minting of antoniniani A.D. 238-249 and the Smyrna Hoard, ANS Notes and Monographs, 156, New York, 1967.

40 Serafina Pennestri (dir.), Il « tesoro » dell’ Agorà di Iasos. Un archivio d’argento ell’ epoca di Plotino, Bollettino di Numismatica, 40-43, 2003-2004 (éd. 2005).

41 Pierre le Gentilhomme, « La trouvaille de Nanterre », dans Revue numismatique, 1946, p. 15-114.

42 H. Mattingly, F. Sallisbury, « A Find of Roman Coins from Plevna in Bulgaria », dans Numismatic Chronicle, 1924, p. 210-238.

43 Nicolas Mouchmov, Le trésor numismatique de Réka-Devnia (Marcianopolis), Sofia, s.n., 1943.

44 Robert Carson, « Beachy head treasure trove of roman imperial silver coins », dans Numismatic Chronicle, 1968, p. 67-81.

45 Jean-Baptiste Giard, « Le trésor d’Allones (Sarthe) », dans Revue numismatique, 6, 1962, p. 217-225.

46 Données compilées dans H. Mattingly, « The Great Dorchester Hoard »…

47 Jérôme Lallemand, « Trésor d’antoniniens à Sterrebeek (Caracalla-Émilien) », dans Revue belge de numismatique, 106, 1960, p. 33-34.

48 Jean Marion, « Les trésors monétaires de Volubilis et de Banasa », dans Antiquités africaines, 12, 1978, p. 179-215.

49 Günther Dembski, Der Römische Münzschatzfund von Gösseling in Kärnten, Römisches Östrerreich, 28, Vienne, Österreischiches Gesellschaft für Archäologie, 2005.

50 Andrea Casoli, Marguerite Spoerri-Butcher, « Un trésor d’antoniniens trouvé à Erétrie (Eubée) : questions de circulation monétaire en Grèce au IIIe siècle ap. J.-C. », dans Revue suisse de numismatique, 91, 2012, p. 111-205.

51 Robert Turcan, Le trésor de Guelma : étude historique et monétaire, Paris, 1963.

52 Pour le règne de Gordien III, le débat porte sur la date exacte de renouvellement de la tribunicia potestas : des antoniniens d’Antioche et des médaillons de Rome portent des légendes a priori invraisemblables : TR P COS P P.

53 X. Loriot, « Itinera Gordiani Augusti, I, Un voyage de Gordien III à Antioche en 239 ap. J.-C. ? », dans Bulletin de la Société française de numismatique, 26, 1971, p. 18-21.

54 Les bronzes impériaux, frappés en grandes quantités mais nettement moins nombreux que les antoniniens, servaient principalement aux échanges locaux et le programme iconographique monétaire semble adapté à cette aire de circulation restreinte à travers l’évocation d’événements liés à la capitale. Une grande variété de scènes de revers (fig. 6) mettent en scène l’empereur : d’abord à cheval et saluant de la main en signe de retour, puis assis sur son trône, recevant un rameau d’olivier en signe de paix et de victoire de la part de Mars ou d’un soldat, puis reçu par Rome qui lui remet le globe terrestre, et enfin tenant ce même globe du pouvoir assis sur une chaise curule.

55 Identifier une liaison de coin consiste à observer une exacte similitude des irrégularités des figures. Cette démarche, également appelée charactéroscopie, postule une usure rapide et donc une durée de vie limitée des coins servant à frapper les monnaies communes. Pour les frappes exceptionnelles, parfois qualifiées de « festives », particulièrement significatives sur le plan historique, un usage discontinu des coins et leur réutilisation sur plusieurs années pour la frappe de médaillons, par exemple, pose de nouveaux problèmes.

56 Le corpus des spécimens en or recensés, illustré supra dans la fig. 3b, met en évidence que les aurei ne sont pas frappés en volume homogène au sein de chaque émission : leur classement reposera donc sur la fréquence des liaisons de coins de droit entre les types de revers.

57 Herbert Seaby, Roman Silver Coins, IV: Gordian III to Postumus, (1ère édition 1971), Londres, B. A. Seaby, 1982, en part. p. 35-39 et 135-136.

58 Jean-Noël Barrandon, Maryse Blet-Lemarquand, Bernard Gratuze et Guillaume Sarah, « Nuclear methods and laser ablation inductively coupled plasma mass spectrometry: how can these methods contribute to the study of ancient coinage? », dans Cercetări Numismatice, 15, 2012, p. 43-56.

59 Les conditions matérielles conditionnent le choix des sujets soumis à analyse, qui proviennent tous du Cabinet des médailles de Paris : le projet souhaitait initialement faire analyser des antoniniens provenant d’un lot homogène, parmi ceux du trésor de Saint-Jean-d’Ardières, mais la restitution de celui-ci à son propriétaire excluait l’exposition des monnaies aux radiations.

60 Commenter le seul catalogue des légendes, des types ou des bustes utilisés revient à occulter les proportions dans lesquelles ces images ont circulé et les dénominations qui les portaient : la portée efficiente du message monétaire – déjà codifié - dépend pourtant des modalités d’émission puis de diffusion de celui-ci.

61 De manière générale, l’iconographie monétaire de l’Empire puise ses types figurés dans la statuaire et les reliefs officiels : les allégories de divinités figurent ainsi généralement la statue du sanctuaire éponyme.

62 M. Spoerri-Butcher, Roman Provincial Coinage, VII.1 : de Gordien Ier à Gordien III, Province d’Asie, Paris/Londres, Bibliothèque nationale de France/British Museum Press, 2006. L’importance des monnayages provinciaux et de l’épigraphie dans la connaissance de la chronologie du pouvoir centrale viennent de faire l’objet d’un recueil d’articles éloquent : Antony Hostein, Sophie Lalane (dirs.), Les voyages des empereurs dans l’Orient romain. Epoques antonine et sévérienne, Arles, Errance, 2012. Par ailleurs, les émissions provinciales de Viminacium et d’Alexandrie sont régulières sur cette période et possèdent leur propre comput, tout en demeurant monotones, donc peu révélatrices d’une trame historique.

63 Michael Alram, Rika Gyselen, Sylloge Nummorum Sasanidarum, I : Ardashir I, Österreichischen Akademie der Wissenschaften, Vienne (Autriche), Verlag der Österreichischen Akademie der Wissenschaften, 2003 ; voir aussi Françoise Demange (éd.), Les Perses sassanides. Fastes d’un empire oublié (224-642), Paris, Findakly, 2006 ; Peter Edwell, « The Sources for Rome's Wars with Shapur I: Eurocentric and Eastern Perspective », Ancient West and East, 9, 2010, p. 155-180.

64 Paul Bureth, Les titulatures impériales dans les papyrus, les ostraca et les inscriptions d'Egypte (30 a.C.-284 p.C.), Bruxelles, Fondation égyptologique Reine Élizabeth, 1964, en part. p. 113 ; X. Loriot, « Les acclamations impériales dans la titulature de Sévère Alexandre et de Gordien III », dans Zeitschrift Für Papyrologie Und Epigraphik, 43, 1981, p. 225-235.

65 Je remercie le comité éditorial pour ses relectures attentives, en particulier Manon Durier, Juliette Kocher, Ghislaine Stouder et Yves Lafond. Leurs conseils avisés ont patiemment stimulé la rédaction de ce travail, à mi parcours entre la production scientifique traditionnelle et la vulgarisation adressée à des scientifiques non spécialistes, mais également à un moment-clé du travail de thèse, lui-même à mi-chemin entre l’achèvement du corpus documentaire et l’exploitation historique de celui-ci.

Pour citer ce document

Par Thomas Bardin, «Appréhender le monnayage de Gordien III : méthodes de numismatique historique», Annales de Janua [En ligne], Les Annales, n° 2, Antiquité, mis à jour le : 30/09/2019, URL : https://annalesdejanua.edel.univ-poitiers.fr:443/annalesdejanua/index.php?id=667.

Quelques mots à propos de :  Thomas Bardin

Statut : Doctorant à l’Université Lumière Lyon 2, bénéficiaire d’une allocation de recherche de la Région Rhône-Alpes – Laboratoire : Histoire et Sources des Mondes Antiques (HiSoMA – UMR 5189) – Directrice de recherches : Sylviane Estiot – Sujet de thèse : Approche numismatique du début de la crise du iiie siècle dans l’Empire romain (238-243 ap. J.-C.) – Thématiques de recherches : histoire et numismatique du monde romain, idéologie et représentations du pouvoir impérial - Articles du même aut ...